Amar El Achab
A l’instar du tango argentin, du fado portugais porteur de la saudade, du flamenco exprimé entre rage et grâce ou du blues noir américain, le chaabi a jailli, au début du XXe siècle dans la basse casbah d’Alger, en écho à une conjonction d’éléments socioculturels, économiques et politiques. Inspiré de l’andalou dont il a adopté certaines structures mélodiques, il s’en écarte cependant au niveau thématique et rythmique tout en se distinguant par un phrasé et un ton particuliers. Les textes, fondés sur des proverbes d’hier et des maximes d’aujourd’hui, évoquent des situations proches du réel et des préoccupations du peuple tandis que les instruments (mandole, banjo, piano…) indiquent des intentions modernistes.
Tracklist
1- Touchia sîkâ/Ouverture en mode sîkâ – 8’34
2- Insirâf al-husayn – 6’33
3- Insirâf raml al-mâya – 2’48
4- Khlâs – 4’34
5- Istikhbar zîdân – 3’56
6- Insirâf zîdân – 3’00
7- Goulou Yamna/Dites-le à Yamna – 5’10
8- El Goumri/Le pigeon voyageur – 8’06
9- Khlâs en mode zîdân – 1’55
10- Istikhbar mawwâl – 4’41
11- Billah alek yâ râyah/Je t’en conjures, ô voyageur – 6’00
12- Ishqî mâ hennani/Mon amour ne m’apaise pas – 2’54
13- Ishqî wu ghrâmî/ Mon amour et ma passion – 3’32
Interprètes et instruments
Amar El Achab (mandole et chant)
Mustapha Yacoub (piano)
Hocine Soudani (derbouka)
Merzak Boudjelouah (tar)
Yahia (banjo)
Réda Djillali (guitare)
Mohamed Mokhtari (violon)
A propos
Histoire d’un genre populaire
A l’instar du tango argentin créé, dans la souffrance, par les “ petites gens ” des quartiers pauvres de Buenos Aires, du fado portugais porteur de la mélancolie indéfinissable saudade de ceux qui prenaient la mer, du flamenco exprimé entre rage et grâce ou du blues noir américain et ses accents de révolte nés de la solitude dans les champs de coton, le chaabi a jailli, au début du vingtième siècle dans la basse casbah d’Alger, en écho à une conjonction d’éléments socioculturels, économiques et politiques. Inspiré de l’andalou dont il a adopté certaines structures mélodiques, il s’en écarte cependant au niveau thématique et rythmique tout en se distinguant par un phrasé et un ton particuliers. Les textes, fondés sur des proverbes d’hier et des maximes d’aujourd’hui, évoquent des situations proches du réel et des préoccupations du peuple tandis que les instruments (mandole, banjo, piano…) indiquent des intentions modernistes.
Littéralement, le terme chaabi signifie populaire et, de fait, il renvoie, sans exclusive, à tous les arts populaires, y compris les genres musicaux régionaux. Ici, il désigne un mode d’expression populaire citadin spécifique à Alger. Nommé au début chaabi-malhûn, car les poèmes composés sur ce registre étaient destinés à être chantés, le genre algérois a également beaucoup puisé dans le répertoire du malhûn dont le corpus est l’œuvre d’artisans marocains.
Mais le modèle absolu demeure la qasida (du verbe qasada : tendre à quelque chose, se résoudre à), ce qui explique la tendance du poète à se résoudre à émettre un message, à narrer un vécu, ou une expérience, jugés digne d’être portés à la connaissance de ses contemporains.
L’un des plus grands auteurs de qasida fut Sidi Lakhdar Benkhlouf, natif de Mostaganem, ville de l’ouest algérien sensible aussi au chaabi. Ses très longues strophes en arabe dialectal rappellent souvent les gloires du passé pour consoler de l’humiliation présente mais ne manquent pas d’embrasser tous les genres poétiques du ghazal (amour) au madîh (religieux), en passant par le hidja (satirique) et le ritha (élégiaque). D’autres comme M’Barek Ben Latbak, El Hadj Aïssa ou Ahmed Ben Triki ont influencé de nombreux maîtres du chaabi. Parmi ces derniers, le plus prestigieux reste El Hadj M’Hamed El Anka, disparu en 1978. C’est lui qui a octroyé au chaabi ses règles encore en vigueur à Alger. Pour éviter la monotonie, le maître a utilisé le procédé bayt wa siyâh qui offre un choix de plusieurs thèmes mélodiques et rythmiques, traversés par des ornementations instrumentales, pour accompagner le chant.
Le bayt signifie un vers de poésie mais devient, au sein de la qasida, un couplet de vers chantés, accompagné d’instruments à cordes (mandole, banjo, guitare et piano), à vent (violon et flûte) et à percussion (derbouka et tambourin pourvu de cymbalettes). Le siyâh, ou istikhbâr, représente le prélude vocal et instrumental. Tout commence par un solo instrumental qui permet de donner la couleur du mode (tab’, échelle modale), puis le chanteur commence par l’interprétation du premier hémistiche du premier vers de l’istikhbâr auquel répond, en solo, un deuxième instrument, puis il reprend, à nouveau, le premier hémistiche suivi d’un deuxième sur fond d’un troisième instrument. Ainsi, l’istikhbâr revient au début de chaque couplet sur un mode différent. Sa fonction consiste à la fois à chauffer la voix et à préparer l’auditoire au thème général de la qasida.
Musicalement, le chaabi s’est, comme nous l’avons déjà signalé plus haut, approprié quelques suites issues de l’andalou comme le raml el maya, le zidane, le mezmoum, l’iraqi et le ghrib tout en puisant dans les rythmes et les harmonies existant localement. On y trouve notamment beaucoup d’emprunts à la musique de Kabylie, région d’où sont originaires la plupart des ténors du style algérois.
Depuis les années 50 à nos jours, le chaabi a été enrichi par de nombreux apports et, surtout, bénéficié de nouvelles compositions. Outre El Anka et Hadj M’Rizek, les plus créatifs sont El Hachemi Guerouabi, Dahmane El Harrachi, auteur de “ Ya Rayah ”, succès international depuis sa reprise par Rachid Taha et Amar El Achab. Ce dernier, dont les chants rythment cet enregistrement, a véritablement marqué son époque par des titres devenus des standards ou des classiques.
Djamel Lounis et Rabah Mezouane
Le contenu du disque
Cet enregistrement présente 13 plages d’écoute au total. Le découpage a été effectué à titre indicatif pour orienter l’auditeur sur les changements de mode et de chanson, et pour lui permettre de revenir sur telle ou telle pièce de son choix. Pour des raisons inspirantes à la structure mime du concert présenté ici, les débuts et fins de chacune de ces plages n’ont pas pu être marqués de façon nette. Aussi pour préserver l’ambiance « live », nous recommandons vivement l’écoute linéaire de cet enregistrement.
- Référence : 321.030
- Ean : 794 881 602 629
- Artiste principal : Amar El Achad (عمر العشاب)
- Année d’enregistrement : 1999
- Année de fixation : 2000
- Genre : Musique traditionnelle
- Pays d’origine : Algérie
- Ville d’enregistrement : Paris
- Langue principale : Arabe
- Compositeurs : Amar El Achad ; Hadj El Anka ; Musique traditionnelle
- Lyricists : Amar El Achad ; Hadj El Anka ; Musique traditionnelle
- Copyright : Institut du Monde Arabe