Heyma

Abir Nasraoui

« Heyma », qui signifie errances en français, est un album né de la complicité d’un groupe d’amis tunisiens qui voyagent depuis toujours entre plusieurs cultures. Leïla El Mekki, la poétesse dont les paroles simples touchent par leur profondeur, Skander Guetari, le compositeur dont les mélodies tantôt languissantes, tantôt malicieuses s’installent au creux de l’oreille et Abir Nasraoui, dont la voix distille la passion pour faire passer l’émotion au-delà de toutes les frontières physiques et symboliques. Onze titres, certains mutins, d’autres plus mélancoliques, feront voyager l’auditeur dans un univers musical généreux créé par plus de douze artistes orientaux et occidentaux.


Tracklist

1Dhâg khâtrî/Langueur – 04’09
2Sâyes/Doucement – 03’27
3Ethnâya wâsscâ/Les chemins paraissent aisés – 04’12
4Yâ nâr/Flamme – 05’01
5Lâ tadkhulî-l-bahr/Ne prend pas la mer – 03’38
6Farkh el hamem/Ô jeune pigeon – 04’06
7Khâfeg/Cœur battant – 03’38
8cayn/Ô Yeux – 06’51
9El ghorba/La nostalgie – 04’17
10Zmân el wâguef/L’ère du vainqueur – 05’12
11Heyma/Errances – 04’11


Interprètes et instruments

Abir Nasraoui (chant, direction)
Ahmed Jebali (oud, percussion, chœur)
Birgit Yew (violoncelle)
Hsin ben Miloud (flûte)
Imed Labidi (percussions)
Iyadh Labbene (violon, warqa, chœur)
Mohamed Abdel Kader Haj Kacem (tabla)
Olivier Cahours (guitare)
Philippe Foch (percussion)
Skander Guetari (chœur)
Thierry Colson (contrebasse)
Abir, Emna, Fairouz, Samah, Samira, Syrine (chœur)


A propos

La première rencontre avec Abir Nasraoui eut lieu quand cet album était encore en gestation. Je la connaissais de nom, avais écouté d’elle une ou deux chansons, sans plus. Concours de circonstances et connaissances communes nous avaient permis de nous croiser plusieurs fois, mais toujours de manière brève, juste le temps de s’échanger quelques politesses. Et puis, nous nous sommes retrouvées, tout à fait par hasard, attablées dans un restaurant du 10e arrondissement, un soir de printemps, à Paname. Certes, on ne résume pas une vie en une soirée, mais on peut quand même en esquisser l’essence. Celle-ci, chez Abir, portait un nom : la passion.

La passion qui l’a d’abord conduite de Tunis à Paris, c’est celle de la musique. Abreuvée de musique orientale et nourrie tout au long de sa formation par les classiques de la musique arabe, Abir bénéficiait, à son arrivée à Paris, il y a de cela quelques années, d’une assise artistique assez solide pour se permettre une ouverture sur les musiques du monde, sans que cela dénature sa voix. Si elle n’hésite pas elle-même à évoquer l’empreinte qu’ont laissé chez elle Paname et son carrefour culturel, ou encore son expérience radiophonique qu’elle poursuit toujours à Monte-Carlo Doualiya, l’artiste sait néanmoins conserver jalousement cette intonation profondément tunisienne que ni la batterie ni les accords de guitare n’esquivent.

Il faudra ensuite toute l’expérience musicale de Skander Guetari, lui-même installé à Paris depuis déjà des années, et une grande complicité partagée par le tandem pour donner naissance à ce mélange improbable, mariage de rythmiques et de sonorités venues d’ici et d’ailleurs. Inutile de chercher à labelliser l’album, il échappe à toutes les catégories, puisant ses inspirations autant sur les rives de la Méditerranée que dans les contrées lointaines, mêlant avec harmonie le « daf » et ses sonorités orientales à la « tabla » indienne, en passant par des rythmes reggae ou tout simplement tunisiens. Le fil rouge existe pourtant : la parole de Leïla El Mekki retentit à travers une panoplie de textes relevant de la poésie populaire, et dont la voix de Abir Nasraoui relèvera tous les accents. On croira reconnaître les thèmes galvaudés de la séparation amoureuse, de l’exil, de la sagesse imagée qui rappelle les proverbes populaires. Mais qu’on ne s’y trompe pas : toute hasardeuse que fût la rencontre entre les deux femmes artistes, la poésie de Leïla El Mekki est empreinte d’une rare sensibilité féminine, que la chanteuse explore sur toute l’étendue de sa voix ; la passion n’étant pas sœur de la réserve.

C’est de la conjugaison des sensibilités de ce trio que cet opus a vu le jour. Un mot qui reviendra souvent dans la bouche de Abir quand elle m’en parlera plus longuement est sans nulle équivoque l’émotion. Cette émotion empreinte d’authenticité ne manquera pas, pour autant, d’appeler à elle les oreilles les moins conformistes.

Sarra Grira, journaliste


Interviews

Abir Nasraoui, vous signez avec « Heyma » (Errances) votre premier album. Si vous nous parliez un peu des circonstances dans lesquelles ce projet a vu le jour ?
L’idée de cet album remonte à 2004. J’avais rencontré le compositeur Skander Guetari par hasard. Il avait entendu parler de moi et voulait me proposer un projet de collaboration dans un registre jazz pop. On a été entraînés par la discussion et le sujet initial est passé à la trappe. J’avais cependant exprimé ma volonté de sortir un peu du moule de la musique arabe traditionnelle dans lequel j’avais évolué jusque-là. Skander, de son côté, avait déjà sorti un premier album intitulé « Alwan » (Couleurs). Comme son nom l’indique, les influences de cet album étaient des couleurs recueillies de par le monde et embrassaient maintes sonorités musicales. Les germes d’un projet métissé y voient d’ores et déjà le jour par le mélange des sons et l’apprivoisement de la langue arabe sur des gammes occidentales. Notre rencontre musicale le poussa davantage vers quelque chose d’encore plus « oriental », quelque chose qui se rapprochait de mon propre univers musical. Notre première collaboration avait commencé avec « Al Ghorba » (L’Exil), qui est à l’origine une vieille chanson du patrimoine tunisien. Je la lui ai chantée, à travers un message vocal sur son portable, en émettant le désir d’en faire une reprise originale. Il l’a enregistrée et m’en a proposé deux arrangements : le premier avait des accents tunisiens, assez traditionnels ; le second prodiguait, au contraire, un souffle nouveau au morceau. Instinctivement, j’ai été attirée par la première version, mais je me suis fait violence et j’ai opté pour la seconde. J’étais consciente de la nécessité d’opérer un tel choix pour concrétiser mon désir d’innovation.

Justement, ceux qui vous connaissent ont plutôt eu l’habitude de vous entendre dans un registre plus classique. Quelle place réservez-vous aujourd’hui à votre formation initiale ?
Il est vrai qu’initialement, je chantais le « tarab » (litt. l’extase musicale, par extension expression pour désigner la musique arabe classique, ndlr) principalement à travers le répertoire d’Oum Kalthoum, mais aussi Asmahane, Abdelwahab, Salah Abdelhay, et bien d’autres. De fait, j’avais peur de tomber dans le piège de l’uniformité et de me mettre à craindre la réaction du public si jamais il me venait à l’idée de m’essayer à un nouveau genre. Je me suis alors rendue compte de la nécessité d’une pareille ouverture, avant que le piège ne se referme sur moi. J’adore le style classique et j’éprouve sans cesse le besoin de revenir vers cette musique. C’est une manière de me ressourcer. Car il faut dire que j’ai aussi grandi avec ces airs. Depuis toute petite, mon père m’a initiée à la musique en me familiarisant avec les disques d’Oum Kalthoum et Abdelwahab. Ses choix m’ont réellement influencée. Après quoi, c’est ma formation et surtout l’environnement dans lequel j’ai baigné qui ont nourri ma culture musicale. Tout le monde chante dans la famille. Moi-même j’étonnais déjà, à l’âge de huit ans, en interprétant des airs d’Oum Kalthoum comme « Habîbî Yessced Aw’âtû (Mon chéri ! Qu’il soit heureux) ». Ma grand-mère, à qui je rends hommage dans cet album, avait aussi une très belle voix. Quand on était petits, on l’écoutait chanter. « Farkh El Hamem (Ô jeune pigeon) », qui figure dans l’album, est la première chanson qu’elle nous a apprise. Depuis lors, cette mélodie ne cesse de m’accompagner. J’entretenais avec ma grand-mère une relation fusionnelle et je ne me suis malheureusement rendue compte de l’intensité de ce lien que lorsqu’elle a disparu quelques mois après mon installation à Paris sans avoir eu l’occasion de lui faire mes adieux. Sa disparition m’avait beaucoup affectée. J’étais très émue lorsque j’ai chanté cette chanson pour la première fois en public en 2005, sur la scène de l’IMA. J’avais le sentiment que sa voix continuait à vivre à travers la mienne. J’ai donc tenu à ce que le titre figure dans le CD. De plus, la chanson étant issue du folklore de ma région natale, elle s’accordait parfaitement avec l’esprit de l’album.

Une rencontre sera déterminante dans la réalisation de ce projet, celle avec Leïla El Mekki qui signe les textes de votre disque. Comment ce duo féminin s’est-il trouvé ?
Je suis arrivée à Paris le 5 octobre 2001. Le jour même de mon départ, je suis allée saluer un ami qui m’est cher, à savoir le photographe Habib Hmima. Avec lui, c’est l’histoire d’une longue collaboration, puisqu’il est le signataire de toutes mes photos depuis 1994, c’est-à-dire depuis ma première scène. Je suis passée chez lui et c’est là que j’ai fait la connaissance d’une poétesse : Leïla El Mekki. Elle m’a offert son recueil et je l’ai emporté dans mes bagages sans toutefois l’avoir parcouru. Ce n’est que quelques mois plus tard, une fois installée à Paris, que j’ai remis la main dessus. Le premier poème sur lequel je me suis arrêtée s’intitulait « Ed’dhûb eshshamcâ (La Bougie se consume) », qu’on a ensuite rebaptisé « Yâ nâr (Flamme) » dans l’album. La sensibilité de cette femme et sa souffrance m’ont profondément touchée… 0n est souvent plus sensibles à la douleur d’une femme. C’est comme si cette dernière pouvait ressentir plus intensément que l’homme ou qu’elle savait mieux exprimer sa souffrance, ou peut-être tout simplement parce que je suis moi-même femme et que je me suis identifiée aux textes de cette poétesse.

J’ai alors repris contact avec Skander et lui ai demandé si ce texte le touchait. Il l’a pris et a commencé à travailler dessus. Entre temps, je continuais à découvrir les textes de Leïla où je retrouvais au fur et à mesure des échos de ma région natale (Kasserine, petite ville à l’ouest de la Tunisie, ndlr). En fait, le dialecte dans lequel elle a composé ses poèmes est celui-là même que parlait ma grand-mère, Paix à son âme et à celles de tous mes ancêtres. Car même si je suis partie jeune, avec ma famille, pour nous installer à Tunis, je garde malgré tout beaucoup d’affection pour cet accent-là. Tous ces éléments ont donc naturellement joué dans la réception que j’ai eue des textes de Leïla El Mekki.

Sa poésie est belle et profonde et m’a donné envie d’écrire à mon tour. Le travail sur l’album m’avait inspiré pas mal d’idées que je notais au fur et à mesure. Car même si les émotions des autres sont profondes et qu’elles nous touchent viscéralement, il est indéniable qu’à un moment on ressent le besoin de mettre des mots sur ses propres sentiments. D’ailleurs, la chanson « Heyma » qui figure sur cet album en témoigne. J’en ai écrit les paroles comme une sorte de préparation à un projet futur, projet dont je serai l’auteure exclusive. Car il est légitime de vouloir chanter ses émotions avec ses propres mots et pas seulement ceux des autres. On peut donc dire que cette expérience m’a fait passer du statut de chanteuse à celui d’auteure-interprète.

Comment avez-vous vécu les circonstances de l’enregistrement ?
Skander a très vite fini la composition de la première strophe de la chanson dont je vous ai parlé et me l’a fait écouter. J’étais émue aux larmes. Je ne sais plus pour quelle raison, Skander a eu du mal à enchaîner sur la suite du poème. Il a donc laissé le texte au gré de l’inspiration artistique et s’est tourné vers les autres poèmes du recueil. Au fur et à mesure, il me contactait pour me dire qu’il avait mis en musique tel ou tel texte. On s’était évidemment entendu sur un certain nombre de poèmes à mettre en musique mais il en a également proposé de son côté, comme par exemple « Dhâg Khâtrî (Langueur) ».

Comme le travail avançait et que certains morceaux composés, comme « Sâyes (Douceur) », avaient connu un succès, j’ai alors appelé Habib Hmima pour lui demander les coordonnées de Leïla El Mekki. Elle était aux anges ! Elle se souvenait de moi et était encore plus heureuse d’apprendre que nous étions toutes les deux originaires de la même région. Le premier contact avec elle a été réellement facile et très agréable. J’ai découvert en elle une femme d’une grande finesse d’esprit, qui prenait un malin plaisir à jouer avec les mots. Elle m’a alors appris qu’elle venait de sortir un nouveau recueil de poésie. Par bonheur, Skander se trouvait alors à Tunis et il a donc ramené ce deuxième recueil dans ses valises. Son titre, très révélateur par ailleurs, était « Jâwabet el-ujâc (Réponses à la douleur) ».

Quand on a commencé à enregistrer, j’étais encore étudiante. Entre les séminaires auxquels je devais assister à l’université et le petit boulot que je faisais à côté pour arrondir les fins de mois, je devais jongler avec mes horaires et m’imposer un rythme rigoureux pour pouvoir assouvir cette passion.

Les premières séances d’enregistrements relevaient presque de l’atelier musical : Skander à la guitare et moi de ma voix, c’est tout. On a commencé par faire la redistribution du texte sur la musique, exercice auquel j’étais rompue et habilitée, non seulement grâce à ma formation littéraire et ma sensibilité poétique, mais aussi et surtout parce que j’avais étudié l’adaptation de la métrique en musique, et ce durant mes études supérieures. Skander a joué le jeu sur ce plan-là. Notre collaboration a vraiment été merveilleuse donnant naissance à une réelle complicité. D’ailleurs, les fous rires enregistrés sur les maquettes suffisent pour en témoigner !

Petit à petit, on a commencé à faire écouter les enregistrements à notre entourage proche et j’ai commencé à me produire en public. Tout se faisait par étapes car Skander n’avait pas encore fini d’aménager son studio d’enregistrement. A l’époque, c’était encore un garage avec un micro et une carte son! (rires). Par la suite une série de concerts, notamment à l’Espace L’Harmattan, à l’Institut du monde arabe, à La Scène Bastille et au Palais Al Abdellia du festival international de Carthage, nous a permis de peaufiner les morceaux au niveau du tempo, des gammes et de l’instrumentation. Le contact avec le public nous a donné des indices et a orienté les retouches pouvant être opérées.

« Heyma» a la particularité d’être un opus très métissé. A ce propos, votre expérience radiophonique, avec l’ouverture sur les musiques du monde a-t-elle influencé la chanteuse que vous étiez ? Qu’en est-il de Paris ?
Oui et non. Lorsque j’ai intégré l’équipe de Radio Monte-Carlo Doualiya, on était déjà bien avancé dans l’album. Mais cette expérience et cette ouverture n’ont pas uniquement influencé l’artiste que je suis. A un niveau personnel, cela m’a permis de découvrir beaucoup d’artistes que je suis allée voir en concert et qui m’ont véritablement touchée. Le contact quotidien, nécessaire grâce aux émissions que je présentais, y était pour beaucoup. De plus, on avait à notre disposition la discothèque de RFI qui est extrêmement riche. Je salue la plus-value que cela m’a apportée. Pour ma part, j’ai toujours été sensible à l’émotion. Il y a des voix qui me transportent. Je citerais, par exemple, Billie Holyday, Chavela Vargas, Estrella Morente, Amália Rodrigues, les grandes voix du Tango – cette musique qui porte en elle beaucoup de souffrances – , sans oublier le fado et le flamenco qui nous sont très proches en tant qu’Arabes, dans leur sensibilité, leur émotion, de même que certaines musiques latino-américaines qui se sont elles-mêmes constituées de mélanges et d’influences diverses. Longtemps en Tunisie, comme dans d’autres pays arabes, les choix musicaux oscillaient en général entre la variété et la musique classique (le malouf arabo-andalou ou le classique oriental). Ce n’est que maintenant que l’on commence à s’ouvrir à d’autres couleurs musicales. Il n’y a pas très longtemps, ceux qui voulaient s’essayer à des genres comme le jazz étaient quasiment des marginaux et ne trouvaient pas d’auditoire capable de comprendre leur musique. De fait, il est plus qu’évident que j’ai eu beaucoup de chance en m’installant à Paris. Cela a changé ma vie, mais également le regard que je portais sur la vie et sur la musique. Je n’ai plus cette vision unilatérale des choses. J’ai élargi, de manière sensible, mon angle de vue ; et mon quotidien n’en est que plus riche.

Quel est le public que vous visez et que vous espérez toucher à travers cet album ?
Mon public est international (rires) et je l’ai constaté lors de mes concerts où plusieurs nationalités se côtoient à l’image des musiciens qui ont joué sur cet album.

D’ailleurs, je ne m’adresse pas seulement à un public communautaire, qu’il soit tunisien, maghrébin ou arabe. J’aimerai toucher un public international car la musique et l’émotion sont sans frontières.

Comme j’écoute moi-même des interprètes pakistanais ou des chanteurs de flamenco, ceux-là qui me touchent et m’émeuvent profondément, qui me portent par l’intensité de leur chant, je me plais à penser qu’une autre personne, sans même comprendre ce que je dis dans mes chansons, puisse en ressentir toute l’émotion que j’essaye de véhiculer et de porter dans ma voix. Le langage du cœur dépasse toujours ce genre d’obstacles…


Détails des enregistrement

1- Dhâg khâtrî/Langueur – 04’09

Languissante
Étouffant sous le poids de la mélancolie
Tout est à mes yeux sens dessus dessous
J’ai beau faire patienter mon cœur
Il était débordant d’amour
Qui courut comme le sang dans mes veines
J’ai beau faire patienter mon
cœur
Il s’en est défendu
Et même l’or a rouillé sur ma poitrine
J’ai appelé à la rescousse ses saints protecteurs et les miens
Lorsque je me suis retrouvée là où je ne devais être
J’ai beau forcé mon cœur à oublier

Il n’a rien voulu entendre
J’ai invoqué ma raison mais mon âme souffrait toujours
Des vents contraires qui me renvoyaient sans cesse au rivage
Moi, pauvre navire sans matelot, loin de toi mon bien-aimé !

2- Sâyes/Doucement – 03’27

Ô toi qui fais souffrir les femmes
Cesses d’être cruel
L’amour est un art subtil qui a ses exigences
L’homme libre ne deviendra guère sbire
Rien n’est éternel
Et celui qui a le dessus pourrait connaître la défaite

Si tu te croies à l’abri du destin
Tu t’induis en erreur
Les Pharaons ne fussent point éternels
Et leur puissance éphémère
De même que la gloire des Ottomans
Les Pyramides ne sont autre que les tombeaux de ceux qui les ont bâties.

3- Ethnâya wâsscâ/Les chemins paraissent aisés – 04’12

Les chemins paraissent aisés et accessibles
Jeune fille, ne t’empresse point
Ne te laisse pas tenter par l’éclat du jour
Ne te laisse pas séduire par les fleurs du printemps
Les voies de la tentation sont multiples
Ne panse pas les blessures d’un cœur noble avec de douces paroles
Si tu le trahis sans l’apprécier à sa juste valeur
Les chemins paraissent aisés et bien larges
Et toi, folle, tu cours essoufflée derrière le vent
Mais qu’espères-tu attraper ?

4- Yâ nâr/Flamme – 05’01

Flamme qui brûle dans mes entrailles
Par la faute de celui qui, comme l’été, est parti sans retour
Il m’a abandonnée, souffrante et alitée

Pleurant mon mal incurable
Pleurant des larmes qui ne me quittent plus
Et j’ai maigri et fondu comme un cierge
Mon éclat s’est terni et tout en moi s’est éteint
Depuis que les veines de son amour ont pris racine en mon sein

Depuis que les liens de l’affection ont envahi mon être
Flamme qui brûle en ma paume…Trêve
L’heure de la délivrance est proche…Pitié
Et vous mes yeux, de grâce, croyez-le à votre tour
Ces étoiles dans le ciel lumineux ne s’éteindront pas
Après tes paroles blessantes
J’aurais voulu oublier ton amour
Mais je me suis retrouvée plus attachée à toi
Comme une bougie qui se consume pour te plaire
Et ma couche continue de te pleurer

5- Lâ tadkhulî-l-bahr/Ne prends pas la mer – 03’38

Ne prends pas la mer, ses vagues peuvent te perdre
Ne tente pas le diable si tu n’as pas assez de cran
Ne suis pas celui qui, dépourvu de grandeur d’âme,
Conduirait à sa perte l’ami le plus fidèle
Ne suis pas celui qui est sans dignité
Et ne te laisse pas séduire par le sourire trompeur du loup
Car celui qui trahit les siens
N’aura aucun mal à délaisser ses compagnons

6- Farkh el hamem/Ô jeune pigeon – 04’06

Ô jeune pigeon, toi qui peuples les tours
Envole-toi bien haut dans les nuages
Si tu comprends ma peine et si tu en as le courage
Cours vite à ma bien-aimée lui faire part de mon amour
Ô toi qui achètes la chique

Prends-en avec mesure
N’en prends que ce qui est nécessaire
Serre-toi et ne m’oublie guère
Ô mon oncle Mahmoud, j’ai besoin de tes conseils
Tout le monde dort sur ses deux oreilles
Et moi, seul, suis privé de sommeil

7- Khâfeg/Cœur battant – 03’38

Cœur battant, il a battu davantage
Dès que tu as envahi mon être
Dévalant la pente, il a creusé

Entre mes seins des lits de rigoles
J’ai senti brûler
Les cierges dans mes entrailles
Et j’ai su pourquoi
Avant même de m’avoir aimée
Tu as voulu fuir
Cœur battant, il a battu davantage
M’a jetée par-dessus les nuages
Son goût est aigre
Et ô combien acerbe
Il trépigne…lourd et sonore
Telle une barque aux mains d’un pêcheur
Qui ne peut la mener à bon port

Cœur battant, il a battu davantage
Comme un éclair
Il m’a laissée languir
Les larmes dévalant sur mes joues
Tant j’aurais voulu oublier
Mais ce fut au-delà de mes forces
Et mes amis, comme mes compagnons, se rient de moi

8- cayn/Ô Yeux – 06’51

Ô yeux !
Pleurez pour lui

Puisqu’il part aujourd’hui
Et déversez votre flot sur mon oreiller et sur mon lit
Car aujourd’hui, l’être cher est parti
M’abandonnant seule, comme l’oiseau solitaire
Lui que j’ai cru être mon compagnon d’infortune
Ô yeux !

J’ai trouvé les liens de tendresse chez lui frêles
J’ai trouvé les liens du cœur chez lui rompus
Il accourait au voyage, sans un mot d’adieu
Et je me suis trouvée ravalant mon amertume
Et la blessure vive continue de saigner, inguérissable

9- El ghorba/La nostalgie – 04’17

Exilée loin des miens
Mes nuits n’en sont que plus longues
Bousculant les pensées dans ma tête
Et laissant mes larmes couler à flot
La solitude et la nostalgie m’oppressent
Et le flot de larmes inonde mes joues
Ils m’oppressent
Et mon cœur et ma raison sont en désarroi en plein exil

Comme l’absence des êtres chers est pesante !
Et les miens me manquent
Mère ! J’ai le mal de toi
J’ai le mal de mes oncles et de nos soirées d’antan
Reviendrais-je pour voir celui qui m’avait fait cette promesse
Pour que je puisse enfin sécher mes larmes ?

10- Zmân el wâguef/L’ère du vainqueur – 05’12

Ton mérite est ton seul ami
Ne te laisse pas avoir par un compagnon ou un pair
Quand tout va pour le mieux
Tout le monde t’appellera Grand Seigneur
Mais quand les temps seront
durs
Tu seras seul à faire face à l’épreuve
Ces temps sont ceux des vainqueurs
Seuls te suivront les opportunistes
Ou ceux qui te craignent
La vie est trompeuse
Ne sois donc pas désinvolte
Ne te laisse pas séduire par l’opulence
Si l’argent remplit tes poches
Voilà mon conseil, garde-le
Ne concède rien à la vie si elle te devient pénible
Nous ne sommes que des feuilles d’automne dans son tourbillon
Et la mort te suit comme une ombre, malgré l’aisance de la destinée

11- Heyma/Errances – 04’11

Une nuit sans lune, un ciel de nuages lourds
La joie est lointaine et mes pensées errantes
Ô étoiles de la nuit ! Vous êtes parties bien loin

Laissant libre cours à tous les malheurs
Ô mer si tendre, dis-moi
Vers où me mène le chemin de la vie ? Je ne le sais point !
Je me souviens d’hier… que c’était beau hier !
Les amis étaient réunis et le cœur était en joie
Me voilà aujourd’hui perdue et exilée

Où me mène donc le chemin de la vie ?
Ô mer si tendre, dis-moi
Vers où me mène le chemin de la vie ? Je ne le sais point !
Seigneur tout-puissant ! Vous qui êtes le seul à connaître mes malheurs
Libérez-moi de mes maux et faites-moi oublier ce qui fut.

12- Dhâg khâtrî/Langueur – 04’10

Instrumental


  • Référence : 321.089
  • Ean : 794 881 979 325
  • Artiste principal : Abir Nasraoui (عبير نصراوي)
  • Année d’enregistrement : 2005
  • Année de fixation : 2010
  • Genre : Music folklorique
  • Pays d’origine : Tunisie
  • Ville d’enregistrement : Paris
  • Langue principale : Arabe
  • Compositeurs : Skander Guetari ; Musique traditionnelle
  • Lyricists : Leila Mekki ; Abir Nasraoui ; Musique traditionnelle
  • Copyright : Institut du Monde Arabe

Disponible en CD : Acheter ici